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16 décembre 2008 2 16 /12 /décembre /2008 07:50
Assis au bord de la mare, je contemplais le monde qui s’offrait à moi : un tapis d’herbes sauvages courait le long de la petite étendue bleue aux reflets dorés et argentés. Une grenouille coassait à pleins poumons sur un nénuphar en fleur. Le soleil, très haut dans le ciel azuré, me réchauffait le cœur.  La vie continuait tranquillement son bonhomme de chemin. Cesbeautés et richesses temporelles m’avaient presque fait oublier la raison de ma présence ici…
Le matin même, j’avais pris le soin d’acheter un énorme bouquet de pivoines et de nigelles bleues et blanches pour ma fiancée. Nous étions ensemble depuis un an et je souhaitais marquer dignement l’évènement et profiter de l’occasion pour aborder avec elle mon souhait de fonder une famille. J’étais prêt pour tout cela. L’avenir ne me faisait pas peur. J’étais féru de généalogie et je me faisais un plaisir fou d’imaginer l’arbre familial s’étoffer encore… Je savais depuis longtemps qu’elle serait la mère idéale pour mes enfants, et qu’elle tiendrait ce rôle à la perfection.
Nous avions rendez-vous à midi chez elle, avant d’aller au restaurant « La soupière d’Ernest », très réputé pour son ambiance feutrée et sa cuisine traditionnelle. Lorsque j’arrivai devant l’appartement de mon amie, je fus surpris de trouver les volets bleus fermés. Je sonnai. Pas de réponse. J’insistai. Mais la porte restait désespérément fermée. Trop excité à l’idée de la retrouver, je n’avais pas vu tout de suite le petit mot lové dans la serrure. Mon visage se crispa. Les mots qui se déroulaient devant mes yeux à présent me faisaient froid dans le dos : « Oublie moi. Je ne suis pas digne de toi. Je n’ai pas l’ossature suffisante pour assumer ce que j’ai pu lire dans tes yeux ces derniers temps. Tu sais comme je tiens à ma liberté… et liberté ne se combine pas avec vie de famille. Je ne te l’ai jamais caché. J’ai même essayé plusieurs fois de te le faire entendre, mais entre toi et moi il y a un immense pont d’incompréhension. Tu n’entends que ce que tu veux bien entendre. L’amour t’a rendu aveugle au point de ne pas voir que je ne suis pas celle que tu espérais secrètement. Je ne veux pas être celle que tu veux que je sois. Rester moi-même. C’est ma seule ambition.  Malheureusement, ces derniers temps je sentais le piège se refermer sur moi, alors j’ai pris la décision de partir. C’était fondamental.  Pour toi, pour moi. « 
Assis au bord de la mare, où nous avions l’habitude de nous retrouver, j’éparpillais quelques pivoines et nigelles sur cette étendue paisible comme l’on éparpillerait des cendres en mer… Je contemplais soudain le monde avec amertume et les yeux embués.
Nanou, Septembre 2007
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commentaires

O
Tous mes voeux de bonne année N@n
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X
on croirait un des ses petits récits japonais presque elliptiques mais chargés de non dit et d'émotion+++
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S
Un très beau texte !
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